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Variability

Avec l'Atheneum, centre culturel de l'Université de Bourgogne

Les textes écrits lors de l'atelier d'écriture créative du
24 octobre 2022

où il est question de merle noir, de petites bottes bleues et de bazooka...
en écho, des textes de Colum McCann, de Valérie Rouzeau, et Jean-Louis Bourdon

Petits cartons

  

Les petits cartons sur la table de la cuisine. Était - il heureux de les découvrir ?

Je le crois, je le soupçonne, je le devine...

Petits cartons de récupération, cartons gris gris comme son paquet de tabac gris

Je crois qu’il en avait besoin de ces petits cartons

je soupçonne que ça le réconfortait

je devine sa joie bien cachée au creux de son coeur

tellement cachée qu’il ne la sentait pas

Petits cartons renouvelés, réutilisés, petits cartons magiques

A l’heure dite il remontait l’escalier, il n’aurait pas manqué sa mission

Les phrases étaient courtes, indiquaient surtout l’heure précise requise

Car c’était lui le premier réveillé de la maisonnée

Il faisait son café dans la petite casserole en aluminium

Petits cartons gris au milieu de la grande table de la cuisine,

Petit carton mignon comme oublié au milieu de l’immensité de la table de cuisine débarrassée et désertée

Petit carton mignon comme un brouillon, comme un cadeau, comme un aveu d’amour invisible

Son voyage de la cuisine en passant par le grand escalier jusqu'à la porte de nos chambres était - il peuplé d’idées, d’attentions, de questions ?

Entre la cuisine et la chambre il pouvait passer par son bureau ou même l’étude et retourner à la cuisine pour sortir le chien et reprendre une gorgée de café refroidi

Le petit carton gris, toujours là au milieu, patient et innocent faisait son office de petit carton. Gentil carton Carton mignon

Au fond il se sentait moins seul avec ce petit carton, tout seul dans la , cuisine déserte, silencieuse, vide

Petit carton mignon, facétieux, et si peu, et si tant beaucoup

Carton miraculeux qui faisait le lien avec ce père si autoritaire si sévère

Mine de rien il nous prouvait son amour, son attachement, sa délicatesse à ne pas vouloir dire trop fort qu’il nous aimait à sa façon

Il avait une grande mémoire pour beaucoup de choses. Il était capable de retenir de grandes tirades, il avait sa méthode pour retenir dans sa mémoire immense comme un grenier une cave un château. Sa méthode consistait à placer aux quatre coins du plafond différents morceaux du texte

 Petit carton mignon gentil carton, est - ce - que tu lisais les phrases restées au plafond ?

Nous aurions pu lui dire au creux de l’oreille l’heure à laquelle il devait nous réveiller en échange d’un tendre baiser accroché à son cou

NON non non petit carton gentil mignon voulait toujours accomplir son rite à tout prix atout gris, petit carton gris sans oubli

Jamais il n’a manqué de nous réveiller à tout prix sans oubli Mistigri

 Thérèse Sellier

Je me souviens des dimanches de mon enfance où nous devions accueillir la famille en « grandes pompes » comme nous disions à l’époque. Cette expression m’a toujours surprise et je l’ai intégrée, comprise quand il a fallu que je participe aux préparatifs.

Je me souviens de l’effervescence que cela créait et du tourbillon de choses à penser et faire : liste des courses, achats, assemblage des couleurs /saveurs, accord des mets afin de satisfaire l’ensemble des convives.

Je me souviens de ce rituel du repas comme autrefois où j’ai tant appris de ma mère par transmission.

A mon tour de le reproduire, de ressentir et mettre en éveil tous mes sens. Au marché, remplir mon panier d’ingrédients colorés et savoureux, écouter les producteurs me raconter le plaisir qu’ils ont eu à les cultiver, prendre le temps de les choisir et avoir hâte de les cuisiner.

Je me souviens de ces dimanches avec ces grandes tablées non avec nostalgie car j’en ai fait le rituel de mes invitations familiales ou amicales.

Quelle joie de partager comme auparavant des réflexions sur la dégustation du  repas, le plaisir de se retrouver dans cette convivialité qui ne demande qu’à se perpétuer indéfiniment.

Nadine Sébille

Un jour, au cours d’une promenade, j’ai vu le ciel bleu ainsi que le soleil qui brillait, qui redonnait un brin d’espoir. Les fleurs étaient en train de s’ouvrir, elles étaient rouges et brillantes. Tout d’un coup, un gland tomba par terre mais discrètement, sans faire de bruit. Un écureuil peureux voulut le récupérer, il regarda à droite, à gauche pour voir s’il n’y avait pas d’embuche sur le chemin. Mais un oiseau volait à fond en direction du gland. C’était un aigle. Il ouvrit ses pattes et s’en empara à l’aide de ses griffes. L’écureuil était déçu. L’aigle posa le gland dans son nid. Tout d’un coup, le paysage s’assombrit... que de brouillard ! Ensuite vinrent la pluie et l’orage. L’orage fit tomber le nid où le gland se trouvait. Et il tomba dans les hautes herbes. L’écureuil cherchait mais il ne trouvait rien. Il attendit la nuit. La nuit, un miracle se produisit, une étoile brillait de mille feux et lui indiquait la direction du gland. Il le retrouva dans la mer dû au fait que le vent avait beaucoup soufflé. Puis l’écureuil revint tranquillement dans son petit coin de nature et repartit sans laisser de traces... sauf son gland.

Adrien Lepetit

FANTASME DE NAISSANCE

 

Je suis née un soir de tempête

Les nuages faisaient la tête ou la fête

Dans un vacarme assourdissant

S'entrechoquant à cause du vent

Quelle sale affaire pour arriver discrètement

 

Je suis née la tête dans les nuages

Emplie de couleurs et de gribouillages

Donc la tête en l'air

Quelle sale affaire pour garder l'équilibre

 

Je suis née trop tôt un soir d'hiver

Surprenant même ma mère

J'avais déjoué les pronostics

Je serai qualifiée de drôle de loustic

Quelle sale affaire pour passer incognito

 

Je suis née d'un regard,

D'un air de guitare

Du désir d'un homme et d'une femme

Un peu trop tôt dans leur histoire, quel drame

Cela aurait pu être une sale affaire .

 

Cela aurait pu être une sale affaire

Si elle m'avait détricotée au fil de fer

Mais leur amour naissant a tout emporté

Et m'a déposée dans les bras de ma mère

Il y a bien longtemps un soir d'hiver

 

Emmanuelle POINSENOT

La variabilité du monde


C’était le début du monde, liquide, fluide, limpide.
J’ondoyais entre les limbes, intrépide.
De mes écailles, je fendais, agile, l’eau translucide.
Mes compagnons palmés étaient joyeux et placides.

C’était vers le milieu du monde, terrestre et verdoyant.
De l’eau, déferlèrent des nuées d’êtres pédestres et rampants.
Aveuglants dans leurs habits d’écailles, menaçants,
Les géants des mers, carnassiers, sortirent assoiffés de sang.

C’était vers la fin du monde, le plus grand prédateur de tous les temps est arrivé.
Il a tout détruit, forêts, montagnes et océans, sous ses deux pieds.
Nos frères, de part et d’autre du globe, ont été massacrés.
Et depuis, pour échapper à l’Homme, je me terre dans ma carapace rapiécée.
(Qui suis-je ? La tortue)

Elisabeth 

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